Le prospectiviste Jeremy Rifkin, père de la théorie de la Troisième Révolution Industrielle, laquelle vise à faciliter la transition vers un nouveau modèle économique défini par le couplage des technologies de l’information, des énergies renouvelables et des réseaux de transport intelligents, a trouvé avec le Luxembourg un terreau idéal pour mettre en avant sa vision d’une économie pleinement interconnectée et durable. Le Luxembourg pourrait, à la faveur de ce processus ouvert, devenir un précurseur des idées innovantes lui permettant de relever les grands défis du futur. Ce processus permettrait notamment de valoriser et de compléter une série d’atouts que notre pays développe actuellement à travers sa politique de diversification afin de constituer une base solide pour réaliser ce pas en avant. C’est la première fois qu’un exercice d’une telle envergure est mené au niveau national, avec une figure emblématique de la prospective en la personne de J. Rifkin.
Abstraction faite des initiatives citoyennes allant en ce sens, le fait de réaliser une vision économique à long terme à échelle nationale est un exercice assez inédit pour le Luxembourg. Les entreprises sont les premières concernées par ce processus et devront affronter nombre de défis dans un environnement technologique et réglementaire évoluant à une vitesse fulgurante. C’est donc tout naturellement que la Chambre de Commerce figure, en tant que partenaire stratégique et à part entière aux côtés du Ministère de l’Economie pour accompagner ce processus d’élaboration et sauvegarder les intérêts de nos acteurs économiques. Leur implication dans la réalisation de cette stratégie sera un élément clef, car l’avenir ne s’envisage pas sans l’implication des entreprises. En se basant sur une approche « bottom-up », elles joueront un rôle moteur lors de l’élaboration des grandes lignes stratégiques et la Chambre de Commerce mettra tout en œuvre pour que les entreprises qui se sentent concernées par ce processus, puissent faire entendre leur voix. Le grand défi de ce processus sera d’adapter les idées de la Troisième Révolution Industrielle aux spécificités de notre environnement socio-économique. Auteur de plusieurs ouvrages à caractère prospectif, M. Rifkin, dispose d’un arsenal d’idées et de concepts hautement intéressants, mais ils ne seront pas nécessairement tous compatibles avec les prémisses d’une stratégie Troisième Révolution Industrielle appliquée au Luxembourg.
Il importe avant tout de confronter M. Rifkin avec les attentes des entreprises face à cette révolution industrielle. Dans une optique constructive et participative, il convient de mettre au défi l’équipe de consultants tout au long du processus et de la rendre attentive aux réalités socio-économiques du pays. A titre d’exemple, pour garantir la pérennité de notre modèle social, une croissance soutenue est nécessaire. La nouvelle révolution industrielle sera-t-elle en mesure de fournir cette croissance ? Cette interrogation paraît pour le moins légitime car si, au-delà de tout processus de révolution industrielle, notre modèle social actuel est insoutenable et doit être réformé, seules les perspectives de croissance futures permettront d’en sauvegarder les caractéristiques essentielles. Par ailleurs, le déploiement de l’économie du partage pourra t-il générer la valeur ajoutée requise afin de soutenir notre niveau de vie, voire de créer et de sauvegarder des emplois stables ?
De même, il faut veiller à bien intégrer au processus les PME issus de secteurs considérés – sans doute à tort – comme étant moins concernés, tels que le commerce, les services ou encore l’Horeca. Comme toute entreprise industrielle, elles consomment de l’énergie, font appel à des prestataires externes, cherchent à réduire leurs stocks de déchets, à optimiser les déplacements, à développer le recours aux énergies renouvelables ou encore à adapter leurs modèles d’affaires à l’aune de la révolution technologique… De surcroît, il ne faut pas perdre de vue les défis à court terme considérés comme « traditionnels », tels que ceux liés au marché de travail, à la simplification administrative ou à la formation. Tous ces défis pourront directement et indirectement influencer la réalisation de la troisième révolution et constitueront des pierres angulaires pour pérenniser la croissance et garantir la compétitivité de l’ensemble des entreprises.
Avec ses partenaires, le gouvernement tente l’exercice de « relier les points » entre les différents secteurs et les nouvelles technologies. Il s’agit d’un exercice ambitieux, permettant de prendre une longueur d’avance sur les autres pays et d’anticiper, au lieu de subir, les mégatendances du futur. Il faut cependant rester pragmatique tout au long du processus et s’assurer que la stratégie lancée reste du domaine du possible, tout en prenant pleinement en compte les spécificités du cadre socio-économique du pays. Prendre son destin en main, c’est façonner l’avenir. Le processus lancé nous permet d’innover et d’anticiper : c’est une opportunité unique qui doit être saisie !
NOTE : Le 24 septembre 2015, le ministère de l’Économie a annoncé la réalisation d’une étude stratégique d’envergure intitulée “The Third Industrial Revolution Strategy” qui sera réalisée avec la Chambre de Commerce et en collaboration avec IMS Luxembourg, avec l’objectif d’identifier et de faciliter au Grand-Duché la mise en place à long terme d’un nouveau modèle économique s’appuyant sur la convergence des technologies de l’information et de la communication (TIC), de l’énergie et des transports au sein d’un réseau intelligent.
Les entreprises souhaitant participer à cette démarche peuvent s’adresser à tir@cc.lu.
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