En avril 2013, à l’occasion de son discours sur l’état de la nation, le Premier Ministre a non seulement constaté qu’ « en 2012, notre économie a connu une croissance de 0,3%. (…) ce qui montre que nous sommes loin d’être tirés d’affaire ». Il a également rappelé que « depuis 5 ans, nous marquons le pas ». Ces deux déclarations valident le propos introductif du discours selon lequel « rien n’est plus comme avant » et que « des changements sont nécessaires ». Mais qu’en est-il de la mise en œuvre concrète du changement annoncé ?
Selon le document de travail de la Commission européenne du 29 mai 2013 joint à ses recommandations émises dans le cadre du semestre européen, les changements nécessaires pour permettre au Luxembourg de renouer avec la félicité économique ne sont pour la plupart que partiellement engagés.
Sur les 5 recommandations adressées au Luxembourg en juillet 2012, une seule (situation budgétaire) bénéficie d’une note quelque peu positive ; pour les quatre autres, la Commission considère que les progrès sont limités. Par ailleurs, s’agissant de la situation budgétaire qui a bénéficié d’un avis favorable, la Commission nuance son propos en disant que « la correction n’est pas encore durable et que s’il n’y a pas de changement de la politique, le déficit devrait se creuser en 2014 et les années suivantes ».
Ainsi, les principaux défis recensés l’année passée restent tous d’actualité et les nouvelles recommandations de 2013 ne sont qu’un rappel des recommandations de 2012, dont la mise en œuvre n’est donc pas satisfaisante. Puisqu’en matière de réformes, le « momentum » est aussi important que le « quantum », l’attentisme luxembourgeois pourrait à terme se révéler être dangereux. Selon les services de la Commission, sur la base des tendances décrites dans le programme de stabilité du gouvernement présenté en avril 2013, si aucune nouvelle mesure n’était prise, la dette publique dépasserait les 70% du PIB en 2030 ; un niveau de dette insoutenable pour notre petite économique ouverte !
Puisque 5 ans après le début de la crise, le PIB du Luxembourg n’est toujours pas revenu à son niveau de 2007, il est indispensable de prendre des mesures pour contrecarrer le ralentissement structurel de notre économie. La Commission Européenne, l’OCDE, le FMI sont d’accord sur les défis à relever par le Luxembourg. Au niveau national, ces mêmes analyses sont partagées par de nombreux observateurs ; malheureusement tout le monde ne semble pas encore convaincu de la nécessité de repenser notre modèle socio-économique. L’art de faire l’autruche demeure monnaie courante au Luxembourg. Or, nous ne pouvons aborder les problèmes du pays qu’en ayant une mentalité propice au changement et une vraie volonté de trouver des réponses face aux défis à affronter. Dans le contexte actuel de crise économique en Europe, une crise politique, souvent couplée à un esprit « anti européen » s’est greffée sur la situation difficile prévalant dans beaucoup de pays d’Europe. Certains observateurs avertis parlent même d’une véritable guerre économique à l’échelle européenne.
Ceci est regrettable, puisqu’une telle évolution va à l’encontre du grand projet européen, basé sur la solidarité, la coopération et le partenariat entre Etats membres. Tous les Etats européens seraient perdants si de telles tendances devaient se poursuivre, voire se renforcer, mais le Luxembourg serait probablement l’un des pays les plus touchés, de par l’ouverture de son économie, le poids du commerce extérieur, le rayonnement transfrontalier de son marché du travail et l’importance des investissements directs étrangers. Toute nouvelle barrière vers l’internationalisation constitue une menace pour le business model luxembourgeois ! Dans un tel contexte hautement dangereux pour le Luxembourg, il est d’autant plus inquiétant de voir qu’une partie de la classe politique semble sous-estimer les défis et dangers actuels. De même, il est regrettable que différentes affaires éclatent au jour et monopolisent l’actualité au Grand-Duché à ce moment crucial.
Il est clair que la lumière doit être faite sur des dysfonctionnements des institutions de l’Etat. Leur fonctionnement efficace et la séparation des pouvoirs sont des éléments de base d’un Etat de droit moderne. Le bon fonctionnement des institutions d’un pays fait partie également des facteurs analysés par les études internationales sur la compétitivité des nations.
Encore faudra-t-il faire la part des choses !
Trop graves sont les problèmes imminents et d’avenir pour qu’on puisse les relayer au second plan. La classe politique doit certes se livrer à un exercice d’introspection pour veiller au bon fonctionnement des institutions, mais en parallèle les responsables politiques doivent s’assurer à ce que le Luxembourg puisse aller de l’avant en tant que société juste et en tant que nation financièrement indépendante, économiquement diversifiée, écologiquement soutenable et socialement intégrée.
Elément encourageant – et c’est sur cet aspect que je souhaite insister dans ce post -, de nombreuses initiatives prises par les entreprises et opérateurs économiques, souvent en concertation et en collaboration avec les autorités gouvernementales responsables, parfois dans un véritable esprit de partenariat public-privé, tentent de relancer l’économie, de créer de la valeur, des investissements et des emplois. Et cela malgré le contexte économique et politique difficile du moment et les pressions pénibles exercées par plusieurs pays sur le business model luxembourgeois.
Après l’annonce du passage, au 1er janvier 2015, du système de retenue à la source vers le système de l’échange automatique d’informations, la place financière a résolument pris le défi de se réinventer dans une perspective post-2014. Certaines activités pourront certes disparaître ou voir leur poids se rétrécir, notamment dans le secteur de la banque privée, mais l’activité des fonds d’investissement, du secteur des assurances, des crédits internationaux et la structuration d’investissements est toujours en plein essor. Et d’ailleurs, ceux qui invoquent la disparition potentielle de certaines activités oublient parfois le caractère dynamique de notre Place. En effet, en phase de se débarrasser de son cliché de « paradis fiscal », la Place et ses acteurs peuvent, de manière proactive, promouvoir le professionnalisme, l’expertise, les compétences et la qualité à la luxembourgeoise et, par là, attirer des investissements de nouvelles régions du monde, jeter les bases pour conclure de nouveaux partenariats avec des acteurs de la finance et attirer de nouveaux clients internationaux.
Le Haut comité de l’industrie a pris ses fonctions et a constitué plusieurs groupes de travail. Il s’agit, ici, de discuter sans tabous des ingrédients à mettre en place et des réformes à engager pour non seulement endiguer la désindustrialisation en cours, mais aussi pour permettre une réindustrialisation et donc pour pérenniser et développer notre « Industriestandort ». Ce n’est pas une mince affaire, mais un effort transversal et d’envergure nationale constitue la meilleure chance de réussite.
Le système national de RDI est en fort développement et les acteurs privés et publics concernés renforcent leurs coopérations et les partenariats. De nouvelles initiatives, souvent basées sur les best practices étrangères, sont dans le tube.
La diversification économique dans le secteur des NTIC a toutes les chances d’aboutir, étant donné la juxtaposition d’un cadre fiscal et réglementaire attrayant (également dans le domaine de la propriété intellectuelle), d’infrastructures d’envergure mondiale, d’entreprises dynamiques, d’ incubateurs, d’une cohérence entre l’action publique et privée.
Le secteur de la logistique, lourdement touché par la crise mondiale, continue son développement et sa diversification. Des projets comme le Luxembourg Freeport sont à relever dans ce contexte… et à imiter.
Les secteurs de l’horeca et du tourisme affichent des résultats relativement favorables. De nombreux efforts entrepris de la part des acteurs du terrain et des autorités pour promouvoir davantage l’offre touristique et les infrastructures afférentes a l’étranger portent leurs fruits.
Les ecotechnologies, les énergies renouvelables, l’eco-construction sont des domaines pour lesquelles de nombreuses entreprises luxembourgeoises ont développe des compétences remarquables. Le potentiel futur est énorme et les échanges et partenariats avec des professionnels étrangers se multiplient (par exemple lors de missions économiques en Allemagne, en Autriche et en Suisse).
Le Forum Investissement, annoncé l’an dernier à l’occasion du discours sur l’état de la nation, a finalement vu le jour ; et ce autour d’une entrevue constructive entre des membres du gouvernement et des représentants des entreprises. Reste à convaincre d’autres parties prenantes (par exemple les communes, …) pour pouvoir entériner, enfin, un véritable renouveau de la simplification administrative.
Les temps faciles sont révolus, les défis sont immenses, mais nous pouvons nous réinventer, à condition que nous mettions en œuvre un véritable effort d’envergure nationale. Les entreprises, malgré le contexte économique et politique difficile, ne baissent pas les bras, ni leurs organes représentatifs et leurs interlocuteurs dans les ministères et administrations du pays. Mais si ces efforts « bottom-up » sont nécessaires, ils ne sont pas suffisants : il faut des impulsions positives de la classe politique, une feuille de route, une vision. Et donc une réponse au malaise actuel, qui ébranle la confiance des citoyens et des entreprises dans les institutions de l’Etat et qui ternissent l’image de notre pays à un moment où le « Luxembourg bashing » monte en puissance de manière inquiétante.
l etat luxembourgeois embauche a tout va.paperjam s en felicite meme..l avenir du luxembourg est assure