Le contexte économique qui entoure l’arrivée du nouveau Gouvernement reste mitigé, avec une lueur d’espoir, mais également des zones d’ombres qui persistent. Ainsi, si en 2013 l’économie luxembourgeoise aura évolué en territoire plus positif, la croissance reste toutefois inférieure aux niveaux pré-crise. Les perspectives pour 2014 laissent entrevoir des éclaircies et une accélération de la croissance, alors que la situation en Europe s’améliore lentement, tandis que les Etats-Unis, la Chine et plusieurs économies émergentes envoient des signaux positifs quant aux perspectives macroéconomiques à moyen terme.
Cependant, au Grand-Duché, les années de forte croissance semblent révolues. L’évolution conjoncturelle exceptionnelle ne parvient désormais plus à camoufler les faiblesses structurelles du pays et le nouveau Gouvernement ne peut guère compter sur une forte reprise économique pour résorber les déficits structurels du pays. En raison de ce changement de paradigme, marqué par une croissance molle prolongée et l’ajustement conséquent du modèle socio-économique luxembourgeois, le Gouvernement devrait mettre en œuvre, sans tarder, un ambitieux plan de sortie de crise basé sur le leitmotiv du « faire mieux avec moins ».
Le programme gouvernemental présenté le 10 décembre 2013 par le nouveau Premier Ministre s’inscrit dans un contexte de stagnation économique inédite, de finances publiques structurellement déséquilibrées et de chômage record. Les défis d’avenir sont nombreux et de taille: le logement, l’économie, la soutenabilité budgétaire, la réforme de l’enseignement, la cohésion sociale, le développement durable, la mobilité. Le « modèle luxembourgeois » de la pré-crise est dépassé. Il doit être adapté à l’air du temps, les décisions doivent être à la hauteur des enjeux et toute inaction aujourd’hui menace directement le Luxembourg de demain. Plus les réformes sont engagées tardivement, plus le coût de l’adaptation sera lourd.
Le désir du changement et de sortir des chemins battus est palpable dans ce premier programme gouvernemental « rédigé à trois » (dans certaines parties plus que dans d’autres). Il faut sans doute accorder le bénéficie du doute à la nouvelle équipe gouvernementale. Après le « délai de grâce », d’organisation et de repositionnement de 100 jours, l’équipe en charge devra rapidement démontrer si la volonté de moderniser, d’adapter et de remettre en question portera des fruits concrets ou, au contraire, demeure une simple déclaration d’intentions.
Dans son introduction, le programme gouvernemental ose dire à voix haute ce que de nombreux chefs d’entreprise et représentants des employeurs ont déjà souvent souligné depuis des années: à politique inchangée, « le Luxembourg ne pourra à terme honorer ses engagements et obligations en tant que membre de la zone euro ». Le besoin de mettre la « durabilité » (cité plus de 90 fois dans le programme du nouveau Gouvernement), sous toutes ses facettes, au centre la politique économique, financière, sociale et environnementale, est reconnu et doit désormais être mis en musique.
S’agissant du volet « croissance et compétitivité », le programme gouvernemental indique que la simplification administrative sera poursuivie et que l’utilisation des nouvelles technologies sera généralisée. Il s’agit, probablement, du vecteur de croissance à court et à moyen terme le moins onéreux et le plus efficace qui soit. En outre, la contribution à la lutte contre l’inflation est une des priorités du gouvernement. La désindexation générale de l’économie sera étudiée. Or, une telle déclaration est-elle compatible avec le statuquo annoncé en matière d’indexation des salaires ? Par ailleurs, la lutte contre l’inflation devra obligatoirement passer par la neutralisation de l’incidence sur l’échelle mobile des salaires d’une éventuelle hausse du taux normal de TVA.
Afin de ne pas compromettre davantage la compétitivité-coût de l’économie luxembourgeoise, et notamment le niveau relativement favorable du coût indirect du travail, la Chambre de Commerce estime qu’il faudra particulièrement éviter toute hausse des cotisations de sécurité sociale.
Du côté des finances publiques, le Gouvernement poursuit « l’objectif de faire mieux avec moins de moyens », ce dont il faut se féliciter. L’architecture budgétaire va être repensée et des glissières de sécurité (plafond d’endettement à 30% du PIB et atteinte d’un solde structurel excédentaire de +0,5% d’ici la fin de la législature) sont érigées. Grâce à une « task force » à créer dans ce contexte, chaque dépense doit pouvoir être justifiée tant par rapport à sa finalité que par rapport à l’économie générale du budget. Ceci équivaut à dire qu’il n’y aura plus d’acquis. Et pour cause : un besoin de consolidation d’au moins 1,6 milliard EUR en est parfaitement incompatible.
La réforme fiscale annoncée doit être couplée à une réforme des transferts sociaux, familiaux et en matière de logement. Il faut encore inclure les aides en matière environnementale dans cette liste. En effet, les volets « recettes » et « dépenses » du budget forment un tout et ne peuvent forcément être dissociés.